lundi 2 septembre 2013

Iles habibas à Oran : une aire marine à protéger

Naima Benouaret a interviewé Ali Halimi, président de l'Association nationale de protection de l'environnement et la lutte contre la pollution. Il s'exprime ici sur la nécessité de mettre en place des mécanismes institutionnels forts pour protéger les zones naturelles en Algérie.
El Watan, le 15.08.13. 

Le dossier porte sur des subventions et l'accompagnement nécessaires à l'élaboration d'une charte de la pêche durable et d'un guide de bonnes pratiques. A ce travail, dont le but est de s'aligner sur les standards internationaux, seront associés les professionnels de la pêche.

Bonne nouvelle pour les gestionnaires de l'Aire marine protégée (AMP) des îles Habibas, au nord-ouest d'Oran : le dossier relatif à un important projet soumis au MedPAN, réseau regroupant des organismes de gestion des AMP de tout le Bassin méditerranéen, vient d'être accepté, a annoncé Ali Halimi, président de l'Association nationale de protection de l'environnement et la lutte contre la pollution (ANPEP). Le dossier, explique la même source, porte sur des subventions et l'accompagnement nécessaires à l'élaboration d'une charte de la pêche durable et d'un guide de bonnes pratiques.

A ce travail dont le but est d'aligner sur les standards internationaux les normes de gestion de cette grande réserve naturelle seront associés les professionnels de la pêche. Sur un total de 45 dossiers émanant de plusieurs pays d'Europe et d'Afrique, le réseau MedPAN a ainsi donné son feu vert à seulement trois d'entre eux, à savoir l'Algérie, la Croatie et l'Espagne. Si les gestionnaires croates cherchent à doter l'AMP du Parc naturel d'un système d'information géographique en vue de faciliter l'analyse et le suivi des processus naturels marins, les Espagnols cherchent eux à renforcer les moyens de lutte contre la pêche illicite dont est victime l'AMP de l'Andalousie, précise M. Halimi.

S'agissant du financement des trois projets, ils sera mobilisé par deux fondations européennes ainsi que le Fonds français pour l'environnement mondial, leur objectif étant d'améliorer l'expertise des AMP et encourager les gestionnaires des AMP de l'ensemble méditerranéen à partager leurs pratiques respectives, indique le président de l'ANPEP.

Aujourd'hui, nous observons de par le monde une prise de conscience réelle sur le rôle important des AMP. Car elles représentent des outils efficaces qui offrent une protection durable, permettent la restauration et assurent l'utilisation prudente de ce legs naturel. L'AMP des îles Habibas, la première qui fut créée dans notre pays, doit servir de locomotive en matière d'expertise de gestion. Et notre source de renchérir :"La région Est recèle plusieurs zones marines qui doivent être protégées, notamment à Annaba, Jijel, Béjaïa, Skikda, El Kala et Chetaïbi. Nombre de ces zones abritent des communautés coralligènes exceptionnelles et plusieurs espèces menacées répertoriées dans la Convention de Barcelone. Nous sommes en train de préparer des dossiers et soumettre nos propositions à Gemalit, un groupe de spécialistes œuvrant pour la protection des aires marines ainsi qu'au Commissariat national du littoral et la Fédération algérienne de pêche qui fait un travail remarquable en se mobilisant dans la lutte contre la surpêche et la pêche illicite".

Pour notre interlocuteur, il est grand temps d'agir pour mettre un terme aux graves atteintes à la biodiversité et à l'écosystème. Les conséquences qui en découlent sont désastreuses sur l'humain et la nature. Les agressions environnementales dans notre pays se multiplient à un rythme inouï considérant la hausse du trafic maritime, la pollution industrielle, la surpêche, l'expansion urbaine le long des côtes, exposant à un danger certain plusieurs zones d'importance écologiques, déplore M. Halimi. Et d'ajouter : "L'Algérie, qui a ratifié la Convention sur la diversité biologique doit s'impliquer davantage dans la protection de l'espace marin et faire en sorte que la conservation de la biodiversité marine soit l'une des priorités politiques, économiques et sociales".

A ses yeux, beaucoup reste à faire, surtout en matière institutionnelle, car les textes existants souffrent encore de tant de lacunes et ne peuvent par conséquent permettre la création de plus d'AMP, c'est-à-dire garantir une conservation efficace des espaces marins. Une mise à niveau du cadre juridique est à ce titre plus que nécessaire. "Nous estimons, par exemple, peu logique que la création et la gestion d'aires protégées en ce qui concerne les parcs nationaux côtiers soit du ressort de la Direction générale des forêts (DGF) et que le Commissariat national du littoral (CNL), sous tutelle du ministère de l'Environnement, soit, en revanche, limité à surveiller la gestion des aires marines et côtières". 

Une caravane éco-touristique algérienne ambitieuse boudée par les sponsors privés

Organisée par l'association Explorer, la "Caravane vers l'est" qui s'ébranlera sur les routes algériennes à partir du 20 août avec une vingtaine de personnes à son bord se veut une expédition éco-touristique. Les idées foisonnent mais les sponsors ne suivent pas.

Le projet est ambitieux.
Partir à la conquête de l'Est algérien avec l'environnement et la nature pour horizon. A travers Béjaïa, Jijel, El Kala, Sétif et Tikjda, la "Caravane" composée d'une vingtaine de membres (organisateurs, journalistes et invités d'honneur), animera des ateliers, des randonnées et des rencontres-débats. "L'objectif est double", explique Nabil Abboud, président de l'association Explorer créée en 2007 à l'initiative d'étudiants de l'Université des sciences et de la technologie Houari-Boumédiène d'Alger (USTHB). "D'une part, faire connaître notre organisation présente dans onze wilayas qui vient de recevoir son agrément et d'autre part, rencontrer les autorités locales pour leur présenter nos actions et établir des partenariats".

Pour mener un tel combat, l'association Explorer compte surtout sur ses forces internes. L'ensemble des membres, au nombre d'une cinquantaine dont la moitié sont membres fondateurs, s'activent depuis la fin juin pour préparer ce convoi atypique. Pendant la "Caravane vers l'est" prévue du 20 août au 5 septembre, huit d'entre eux assumeront le rôle d'organisateurs, deux seront chargés de la coordination, trois du planning et deux de la restauration. "Cette année, nous aurons un cuisinier avec nous", précise Meriem Djouhri qui fera partie de l'équipe restauration pour la seconde année consécutive. "La Caravane 2012 composée de 21 participants a été un peu difficile à gérer car nous n'avions aucune expérience dans le domaine de la restauration collective mais maintenant nous sommes mieux préparés".

Absence de sponsors privés

Du côté des ressources externes, en revanche, le renfort manque cruellement. "Nous avons envoyé notre dossier de sponsoring à une vingtaine d'entreprises privées mais pour l'instant nous n'avons reçu aucune réponse positive", confie Samy Mohammedi Bouzina, responsable du sponsoring. Faute d'apports financiers extérieurs pour boucler le budget estimé à un million de dinars, les organisateurs ont dû revoir leurs ambitions à la baisse. "On va sûrement annuler les projections sur les places des villes traversées ainsi que les formations auprès des associations locales que nous avions programmé de prendre en charge", déplore le président Nabil Abboud. Le nombre de participants a par ailleurs été restreint à une vingtaine au lieu de cinquante prévus initialement. Leurs cotisations permettront de payer les frais de nourriture, d'hébergement et de transports.

Soutien de la Direction générale des forêts

Si le privé n'a pas répondu à l'appel, le public à travers la Direction générale des forêts (DGF), soutient, elle, l'initiative de l'association. L'organisme dépendant du Ministère de l'agriculture et du développement rural a mobilisé ses directions régionales pour accompagner la Caravane lors de son passage. "A Jijel, l'hébergement de toute la Caravane est pris en charge par la DGF", indique Nabil Abboud. "A Tikjda, la DGF encadrera le bivouac ainsi que la randonnée et l'exposition".

Échaudé par le manque de réactivité des entreprises privées, l'association Explorer est en train de revoir sa stratégie de financements. "L'association avait décidé de ne pas prendre de subventions étatiques pour rester dans le cadre de l'organisation non gouvernementale (ONG) mais, suite à cette expérience, on va peut-être revoir notre jugement", reconnaît Nabil Abboud qui ne manque pas de rappeler que les actions d' Explorer ne se limitent pas à la "Caravane vers l'Est". L'association a mis en place un programme d'éducation environnementale à destination des écoles et prépare un festival d'écologie urbaine qui se déroulera au mois de février à la Casbah. Mais pour l'instant toute l'équipe d'Explorer se mobilise pour la Caravane. "On partira avec des flyers, des casquettes, des tee-shirts et surtout notre bonne volonté", conclut le jeune président de l'association.

Nejma Rondeleux, à propos de la difficile mise en route d'un projet éco-touristique.
Maghreb émergent, le 06.08.13.

A Béjaia, une forêt est sauvée in-extremis d’un massacre au béton

Le pouvoir politique a plié devant la pression de la rue. Il vient, en effet, de céder devant la forte mobilisation de la population de la ville de Béjaïa, qui s'est fermement opposée à l'attribution d'un espace vert, de plus d'un hectare, à un promoteur dans le tourisme.
Les autorités de wilaya, à leur tête le wali de Béjaïa, Hammou Ahmed Touhami, viennent de renoncer à un projet d'hôtel qui allait être érigé au niveau du boulevard Amirouche, en plein de centre de Béjaia, sur un espace boisé, situé non loin du théâtre régional de la même ville. Si la banderole de plusieurs mètres déployée sur les lieux depuis plusieurs jours comme pour dissuader ceux qui seraient tentés de revenir à la charge, l'annonce de l'attribution de cette forêt, un véritable poumon dans la vieille cité, a pris une ampleur de scandale et mobilisé une grande partie de la population. Une mobilisation qui a été payante puisque le  wali de Béjaïa a préféré annoncer rapidement l'annulation du projet qui, selon les protestataires, violait les règles d'urbanisme. Le projet prévoyait la construction d'un hôtel alors que les centaines d'arbres centenaires pour la plupart, qui forment le tissus végétal du site, servent à stopper un glissement de terrain et donnent ce cachet particulier à l'une des plus anciennes villes méditerranéennes.

Mobilisation citoyenne
Jamais de mémoire de Béjaouis, une cause n'a autant mobilisé la population. Les premières actions de rue, initiées par les habitants du boulevard Amirouche et relayées par les réseaux sociaux, ont eu raison des velléités de la "mafia du foncier", qui convoitait cet espace vert. "Après avoir amputé le parc d'attraction, la zone humide de Mezzaïa, de plusieurs hectares pour y ériger une coopérative immobilière, des sièges d'institutions publiques et accordés des permis de construire tous azimuts à des promoteurs immobiliers indélicats y compris sur des terrains forestiers, ils viennent à présent s'emparer d'un espace aussi vital que cette forêt du Boulevard Amirouche", peste un des animateurs du mouvement de protestation.

Medias et réseaux sociaux en renfort
Approuvé dans la plus grande discrétion par les autorités locales, ce véritable massacre écologique n'aurait pu être évité sans la vigilance de certains cadres de la wilaya hostiles au projet et qui ont ébruité l'affaire via les médias et réseaux sociaux. Des informations détaillées sur le bénéficiaire du terrain - un promoteur d'une wilaya limitrophe - et des détails sur le projets étalés sur la place publique ont suffi à donner naissance à un mouvement de protestation qui voyait ses rangs grossir au fil des jours. Dans leur missive interpellant le wali, les citoyens de Béjaïa ont rappelé que le terrain, objet de la concession "abrite des arbres centenaires que ni le colonialisme, ni les intempéries ni même le temps qui passe n'ont pu arracher ; véritables poumons et imparables stop pollution, ajoutons à cela le rôle stabilisateur contre la menace perpétuelle d'un glissement de terrain.". L'ampleur du mouvement de contestation et le formidable élan de solidarité né autour de la protection de ce patrimoine naturel n'ont pas échappé au pouvoir politique local. Le projet a été annulé. Une belle victoire de la mobilisation citoyenne. 

Nabil Zenache, à propos de la mobilisation citoyenne à Bejaïa contre la destruction du poumon vert de la ville.
Maghreb émergent, le 07.08.13

Le réseau algérien des femmes en économie verte veut prendre de l'envergure

Nejma Rondeleux, à propos du développement du réseau algérien des femmes en économie verte.
Maghreb émergent, le 19.05.13

Femmes en économie verte. Le pari est difficile. Le réseau algérien des femmes en économie verte veut relever le défi, et permettre à des femmes d'investir ce créneau.

Depuis sa création en novembre 2012, dans le cadre du programme allemand GIZ-DEVED, « Développement économique durable », le réseau algérien des femmes en économie verte (RAFEV), a mis en place plusieurs outils et actions. Sa présidente, Karima Bergheul, souhaite à présent l'ouvrir plus grand nombre. « Rafev est ouvert à toutes les femmes opérant dans le domaine de l'écologie et de l'économie verte », dit-elle, en guise d'appel. Le réseaus « vise à regrouper toutes les parties prenantes, des chercheurs aux praticiens, en passant par les universitaires, les associations et les institutions publiques, telles que l'ANDPME, les agences de promotion de l'investissement, les pépinières d'entreprises, etc. », poursuit cette chercheuse au Centre de développement des énergies renouvelables (CDER) de Bouzaréah. Le réseau offre ainsi à ses adhérentes, femmes actives dans le domaine de l'entreprise ou de l'agriculture, des conseils et un accompagnement dans leurs projets.

Le réseau est né en novembre 2012, à la suite d'une conférence organisée à Alger par le programme GIZ-DEVED sur le thème «Employabilité et entrepreneuriat pour les jeunes et les femmes dans l'économie verte en Algérie ». Il une cinquantaine de membres actifs, entre autres, dans le recyclage des déchets, les industries propres et l'agriculture verte. « Rafev rassemble, par exemple, la fondatrice de l'entreprise de recyclage Plasticycle, une chef d'entreprise spécialisée dans les matériaux de construction écologique, ainsi qu'une porteuse de projet qui envisage de créer en Kabylie une entreprise de récupération de grignon d'olives pour produire de l'énergie biomasse », détaille Karima Bergheul.

 Une plateforme d'échanges et de conseils

 Rafev n'a toutefois entrepris qu'une seule action à destination du grand public. Le 25 avril dernier, le réseau a tenu son premier forum autour de l'entrepreneuriat et de l'employabilité des femmes dans l'économie verte en Algérie. Organisé sous le patronage de la Secrétaire d'Etat chargée de l'environnement, Dalila Boudjemaa, avec l'appui technique du programme GIZ-DEVED, en collaboration avec le Ministère de l'Industrie, de la PME et de la Promotion de l'Investissement (MIPMEPI), cette rencontre avait pour principal objectif de regrouper les acteurs et institutions concernés par le développement économique durable pour une meilleure collaboration intersectorielle et un réseautage. 

Grâce à la mise en ligne d'une plateforme web Rafev, le réseau dispose d'un outil de sensibilisation et de communication permanent au-delà des rencontres physiques. « Cette plateforme répond à un besoin d'échange et de dialogue entre les PME et les différentes parties prenantes de l'entrepreneuriat durable en Algérie », explique Karima Bergheul. Conçu comme un dispositif d'appui, le blog présente les différents programmes d'aides existants pour les porteurs de projets dans le domaine de l'économie verte et propose, à travers la mise en ligne de guides, certaines réponses aux difficultés et problèmes rencontrés par ses membres. 

Suite au premier forum de Rafev, le réseau s'est doté d'un plan d'action. « Nos différentes réunions, nous ont permis d'établir une feuille de route portant sur l'identification des secteurs porteurs et des métiers verts, des acteurs et partenaires potentiels, ainsi que des difficultés et contraintes susceptibles d'être rencontrées par nos membres », déclare la présidente du réseau, qui prévoit d'organiser prochainement des rencontres un peu partout dans le pays afin d'attirer encore plus de femmes dans l'économie verte. « On souhaite construire un réseau d'adhérents motivés dans toutes les wilayas », précise-t-elle.